1815 La Grave pour un retour en Isère

La Grave – la Meije, Carte postale peinte début XXe.

1815 LA GRAVE, POUR UN RETOUR EN ISÈRE 
Remerciements pour ce document transmis par Mme Marie-Louise PUDDA

Autre lien : La Grave en Oisans , Passage du Col du Lautaret en dans les années 30

Texte publié dans la revue La Meije, janvier 1960, de Paul-Louis Rousset.

HISTOIRE LOCALE

Il s’agit aujourd’hui d’une lettre adressée autrefois à l’Évêque de Digne par le Curé de La Grave pour le rattachement des habitants de La Grave au département de l’Isère, lettre dans laquelle il expose les raisons de cette demande, autour des années 1815 environ. Le brouillon de cette lettre a été trouvé dans les archives d’une famille de La Grave. Nous le recopions textuellement pour information, sans vouloir soulever aucune polémique.

Voici la lettre : 

Monsieur,
Les habitants de ce canton ayant eu l’option en 1790, lors de la circonscription des départements de la France, de rester unis comme ils avaient été depuis un temps immémorial au département de l’Isère, ou de s’unir à celui des Hautes-Alpes, ont opté mal à propos pour ce dernier département.

Les motifs de cette option étaient fondés alors sur l’espérance de jouir de quelques privilèges qu’avaient les Briançonnais, lesquels privilèges consistaient : 
1) À ne pas concourir aux levées d’hommes qui se faisaient annuellement sous le nom de Milices,
2) d’avoir le sel à 15 centimes de livre ancienne au lieu d’être obligés de le payer 35 centimes.
3) MM. les Briançonnais n’ont pas manqué à cette époque d’envoyer dans le canton de La Grave des hommes intelligents pour pérorer les habitants et les déterminer à cette option. Ces députés qui étaient intéressés à obtenir une administration de district à Briançon, qu’ils n’auraient pu obtenir sans la population de La Grave, n’ont pas oublié de faire valoir les privilèges sus énoncés et autres. Ils ont même promis verbalement au nom de leurs concitoyens de nous faire participer de leurs énormes forêts de bois étant extrêmement rare en ce canton.
Les motifs qui avaient déterminé les habitants de ce canton à se séparer de leur ancienne patrie pour s’unir aux Hautes-Alpes étant dès leurs principes illusoires tout comme les promesses sus-énoncées, les habitants en général sont de l’avis de demander leur réunion au département de l’Isère, et en conséquence, ils m’ont invité à appuyer en mon particulier les réclamations que l’Administration locale voudra bien faire à ce sujet en exposant les avantages qui en résulteraient pour ce canton comme on le verra ci-après.

Les avantages des habitants de La Graves d’être séparés des Hautes-Alpes et réunis à l’Isère sont : 
1) Que leur commerce se fait tout dans le département de l’Isère, et notamment à Grenoble, dont la distance à La Grave n’est que de six myriamètres (de myriade = 10 000 m soit 10 km), au lieu que ce dernier jusqu’à Gap, il y en a dix.

2) Que pour aller à Grenoble pour affaires administratives ou judiciaires, l’on peut pour se défrayer de ses dépenses y transporter quelques denrées et en rapporter d’autres, ou mieux l’on aime profiter des occasions journalières qui se présentent pour faire faire ces commissions.
Il en est de même pour les affaires ecclésiastiques, car dans un pays aussi rétréci, où il ne s’établit pour ainsi dire aucun étranger, et où par conséquent les habitants sont presque tous parents ou alliés, il faut envoyer un exprès à Digne, distant de La Grave de 15 myriamètres pour obtenir des dispenses de parentages pour les mariages ce que l’on pourrait faire faire à Grenoble par occasion et éviter ces frais de voyage qui sont énormes.

3) Qu’il est reconnu que plus de 100 marchands colporteurs qui émigrent annuellement sont obligés de dépenser chacun 15 fr. 00 pour faire le voyage de Gap pour obtenir le visa de M. le Préfet sur leur passeport de même que sur leur livret, ce qui fait la somme de 1.800 qui pourrait servir en payement des contributions ou au soulagement des familles de ces braves gens qui s’émigrent par fonce pour gagner leur vie pendant six mois pour ne pas manger une portion de pain noir qu’ils ont ramassé à leurs enfantes pendant la belle saison.

4) qu’il est évident qu’étant réunis à l’Isère, il n’auraient aucun détour à faire de La Grave à Grenoble qu’ils rempliraient toutes ces formalités sans frais et une partie de leur route se trouverait faite.

5) Que pendant 5 à 6 mois de l’année et notamment depuis le mois de novembre jusqu’au mois de May, la route beaucoup mieux praticable de La Grave à Grenoble que de La Grave à Briançon pour aller à Gap par rapport à la montagne du Lautaret.

6) Que les eaux pendantes du Lautaret et les sources de la rivière de la Romanche nous portent naturellement à faire partie du département de l’Isère et non de celui des Hautes-Alpes.

7) Que le vœu général des habitants, en demandant leur réunion au département de l’Isère, serait de conserver le canton de La Grave, lequel par rapport aux localités ne peut être réuni à d’autres cantons. Tel serait aussi mon avis.

(Le document s’arrête ainsi.)

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