Dans les pas de Florian Vallentin

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Marmite de géant ou « citerne » Photo L. ALBERTINO

DANS LES PAS DE FLORIAN VALLENTIN
Avec la participation de : André BRUN, Pierrette et Joëlle ROCHETTE, Thierry GRAND, Gérard DIONNET

Sur le même sujet : La voie romaine de Vallentin en 8 épisodes. 

Été 1876, après un long périple sur les sentiers du Dauphiné, un jeune savant d’à peine 26 ans, bâton à la main, son sac sur les épaules, arpente le chemin du Ferraret de Venosc.
Il observe, mesure et note consciencieusement sur son petit carnet : « … Sur le sommet de la deuxième tête se trouvent les ruines d’un ancien poste, la dimension des citernes varie entre 2 m 40 cent. et 0 m 70 cent. de diamètre, il est assez difficile d’en sonder la profondeur, car des arbustes y ont poussé. »

De ce périple, Florian Vallentin, notre savant archéologue, va rédiger un long compte-rendu sobrement intitulé : « La voie Romaine de l’Oisans », publié dans le Bulletin de l’Académie delphinale en janvier 1877.
Vallentin y décrit un lieu appelé « le Camp » ou « la Citerne ». Cette Citerne, géante selon lui, aurait disparu, comblée après l’effondrement d’une des quatre parois qu’il désigne comme « têtes ». Le site ferait partie d’un ensemble regroupant « 18 autres citernes taillées dans le rocher » de dimensions variées avec des diamètres allant de 3,50 m à 0,45 m ; des pans de murs ; des décombres provenant d’un château et, en contre bas, un chemin bien conservé appelé « le Ferret », voie pavée et bordée de murs, qu’il suppose comme la continuation de la voie romaine de Brigantio à Cularo (Briançon à Grenoble).
Sur ce même lieu, il indique la présence de deux escaliers taillés dans un roc en encorbellement menant au point culminant, la plus haute tête, un point de vue magnifique dominant la vallée du Vénéon, appelé encore aujourd’hui, « la Tête du Château ».

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De gauche à droite, Pierrette, Maurice, Thierry, Gérard, André, Joëlle, Lionel – Photo L. ALBERTINO

Mars 2022, soit 145 ans plus tard, sept « explorateurs » remontent la piste du jeune archéologue pour se rendre sur cette portion particulière du chemin de Venosc.
André Brun, notre guide Venosquin ; Pierrette et Joëlle Rochette, Venosquines également ; Thierry Grand, géologue de l’Oisans qu’on ne présente plus ; Maurice Rignon, passionné de géologie ; Gérard Dionnet trésorier de l’Association Coutumes et Traditions de l’Oisans et moi-même avons emprunté le chemin du Ferraret en direction de « la Tête du Château ».
Notre promenade est ponctuée de quelques poses agrémentées par les explications très enrichissantes d’André et Thierry, mais aussi jalonnée par de petites lectures appréciées de la très intéressante signalétique présente sur les chemins et dans les rues du village de Venosc.
Un peu plus loin, nous dépassons un premier poli glaciaire (roche moutonnée comme la qualifie Thierry), signe de la présence d’un glacier il y a très longtemps en ces lieux.

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Polis glaciaires. Photo L. ALBERTINO

André nous propose un petit détour par les Cristallières. Nous marquons une première halte à la Charbonnière de Venosc où Thierry et André exposent formation et exploitation du charbon à Venosc au xixe siècle.
Nous reprenons en direction du Ferraret ; aujourd’hui, il ne reste qu’une ruine là où il y a un siècle vivaient 10 personnes (en 1896). Je songe que quand j’étais enfant, j’ai vu cette maison encore debout.
Nous nous écartons du chemin pour prendre la direction de la Tête du Château. Nous avançons difficilement, la végétation est très dense, mais après quelques efforts, nous arrivons sur un terrain plat en contre bas des trois murailles imposantes que Vallentin appelle les « trois Têtes ». Notre attention est tout de suite attirée par un mur de pierres sèches, assez long ; nous y retrouvons bien là la description de l’archéologue. Et encore aujourd’hui, le mur est assez bien conservé, il ressemble, de par ses caractéristiques, à un mur d’enceinte de château.


En avançant, plus profondément toujours en direction des « trois Têtes », nous apercevons de nombreux autres murets auxquels sont accolées de petites parcelles de terre. Chaque centimètre carré de ce terrain plat a été valorisé et exploité, il n’y a pas si longtemps sur ce site.
Conduits par Pierrette et Joëlle, nous remontons vers l’une des « trois Têtes », et découvrons une première « citerne ». Sans la connaissance du terrain de nos deux amies, nous serions certainement passés à côté sans la voir. La cavité masquée par la végétation est petite, à peine 80 cm de diamètre pour une profondeur de 60 cm. Très difficile, comme l’indique Vallentin dans son texte, de voir dans cette formation rocheuse une intervention humaine, mais plus certainement une marmite glacière (aussi appelée marmite de géant), formation naturelle résultant du passage d’un torrent (peut-être sous-glaciaire), entraînant dans un tourbillon un galet plus dur qui, à force de tourner, élargit et creuse cette cavité.
Non loin de là, une deuxième marmite, plus large, mais moins profonde, confirme la première analyse : ces excavations ne sont pas de la main de l’homme. La végétation est trop dense pour en découvrir d’autres…
L’ascension se poursuit. Une première « tête du château » dévoile un panorama sur la vallée du Vénéon, sans pour autant nous révéler les ruines ou marches d’escalier taillées dans le rocher décrit. La dernière tête ne révèlera rien de plus.

Sur le chemin du retour, dans mon esprit, la voie Romaine proposée par Vallentin s’étiole puis disparaît recouverte par une végétation luxuriante comme le site que nous venons de traverser. Une prospection plus poussée donnerait peut-être un tout autre résultat, mais à cette heure, de ce que je peux en dire, la « Tête du Château » demeure une jolie promenade sans connexion avec la voie romaine telle que décrite par le jeune savant. Un site très intéressant à visiter avec toutes les précautions d’usage.

Merci à tous les participants pour cet agréable après-midi sous le signe de la découverte dans les pas de Florian Vallentin.

Ce texte a été initialement publié dans le bulletin No 115 de l’association Coutumes et Traditions de l’Oisans.

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