Francesco David Bonino

eglise1950FRANCESCO DAVID BONINO 
Le destin funeste d’un maçon italien arrivé en terre promise. Un homme poursuivi et rattrapé par ses démons, qui finira oublié de tous dans le carré des indigents du cimetière de notre village*.

Le Petit Dauphinois – samedi 12 mars 1932

Un cadavre dans la Romanche
C’est celui d’un Italien qui venait chercher du travail au Chambon.
Le Freney-d’Oisans (Isère), 11 mars.
— M. Auguste Gravier, de Mont-de-Lans, se trouvait à la pêche sur le bord de la Romanche, dans les gorges de l’Infernet, au Fréney-d’Oisans, lorsque son attention fut attirée par une forme humaine qui était allongée sur un banc de sable. S’étant approché, le brave pêcheur se trouva en présence du cadavre d’un homme complètement défiguré. La boîte crânienne était complètement fracassée et vidée en partie de sa matière cérébrale.

La gendarmerie du Fréney-d’Oisans, informée de cette macabre découverte, s’est rendue sur les lieux. Les constatations ont été faites par M. le docteur Faure, de Bourg-d’Oisans, ainsi que par M. le juge de paix et le maréchal des logis chef Blanc et le gendarme Colladot (NDA, orthographe vérifiée).
Au cours de l’enquête, il a été établi que la victime avait fait une chute du tunnel de l’Infernet jusque dans le lit de la Romanche, c’est-à-dire d’une hauteur de 200 mètres environ.
Le mort a été identifié. Il s’agit d’un nommé Bonino Francesco-David, 42 ans, ouvrier maçon, parti le 29 février dernier de St-Martin-le-Vinoux (Isère), pour venir s’embaucher au barrage du Chambon.
Cet homme qui, paraît-il, s’adonnait à la boisson et ne connaissait pas la région excessivement dangereuse du Haut-Oisans, a pris une des fenêtres du tunnel de l’Infernet pour la sortie normale et a fait une chute mortelle.
Bonino était né le 19 avril 1890, à Biella (Italie), et était célibataire.

*Aujourd’hui, plus de 81 ans après ces tragiques faits, je suis monté au cimetière, avec l’espoir de trouver une tombe ou une plaque avec le nom de M. Francesco David Bonino.
Rien ; pas un petit carreau d’émail, pas une croix, pas un vestige d’une vie, qui finalement tient sur 10 cm2 de papier élimé et jauni… et aujourd’hui, un article de quelques lignes pour raconter l’histoire de ce malheureux maçon italien qui aimait sans doute trop le vin.
Sans cette tragique fin au fond des gorges de la Romanche, Francesco Bonino aurait sans doute rejoint la communauté des milliers de travailleurs d’anonymes venus participer à la construction du barrage, repartis sans laisser la moindre trace de leurs passages dans notre région.
Je pense que M. Bonino aurait sans doute préféré rester anonyme et continuer un bout de chemin sur cette terre, dans le monde des vivants. Sa destinée fut tout autre. Ce que nous sommes et ce qui reste de nous après notre passage, tient finalement à peu de choses.

Sources :
Registre de Mairie du Freney-d’Oisans année 1932.
Archives André Glaudas :
1932-A.Glaudas- § 11, p. 1 : Article du Dauphiné Libéré, un cadavre dans la Romanche.

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