Prégentil, une énigme résolue !

PRÉGENTIL, UNE ENIGME RÉSOLUE !
Source : Archives André Glaudas.
Article de M. André Glaudas,
Publié dans la revue « Autrement dit » du Bourg-d’Oisans en février 2001.

Paul Helbronner
Compiègne 1871 — Paris 1938
Topographe qui consacra sa vie à la science de la géodésie, très utile à l’établissement des cartes. Son œuvre maîtresse « La description géométrique détaillée des Alpes Françaises » (12 volumes) lui valut de passer de longues années dans les Alpes. Une rue de la ville de Grenoble porte son nom depuis 1969. On lui doit aussi une liaison trigonométrique entre la Corse et le continent.
Il calcula l’emplacement exact de l’île de beauté. Alors qu’il avait à peine 20 ans, on donna son nom à un pic du massif de Chamonix : la pointe Helbronner (3462 m). C’est celle où l’on devait construire, longtemps après, la gare du téléphérique de la Vallée Blanche. Il sera élu à l’Académie des Sciences en 1927.

Autre article sur Paul Helbronner : Au travail sur le grand Pic de la Meije

Promeneurs, chasseurs, randonneurs du GR.50, tous posaient les mêmes questions, quoi servaient les installations de tir scellées au sommet de la falaise du Prégentil à l’aplomb du vide ? Depuis quand sont-elles là ?

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Reste des plates-formes taillées dans le rocher au sommet du Prégentil.

C’est Monsieur Michel Coûteaux, un scientifique du CNRS à la retraite, amoureux de notre pays de l’Oisans, qui nous en apporte aujourd’hui les réponses. Au cours des combats aériens de la guerre de 1914/1918, les canons placés à bord des aéronefs allemands présentaient de meilleures performances que ceux de l’aviation française. Il fallait, au plus vite, remédier à cette déficience. L’État-major du ministère de l’Armement confia à M. Paul Helbronner les études balistiques de notre armement avionique. C’est ainsi qu’en juin 1918 débarquaient à l’Hôtel Oberland et au Grand-Hôtel (1) du Bourg-d’Oisans, Helbronner accompagné d’un aréopage de techniciens, dont M. Villat professeur à la Faculté des Sciences de Montpellier, M. Appel recteur de l’Université de Paris, Lucien Forgeron agrégé de mathématiques… etc. Une trentaine de serbes échappés à la retraite de l’héroïque armée du roi Pierre assistaient aux réglages à titre d’observateurs. La logistique de l’opération était assurée par 200 chasseurs alpins aux ordres du Lieutenant Arnaud, cantonnés chez l’habitant au Bourg-d’Oisans et au Villard Reymond. Un cinéaste des armées prit des films de ces diverses opérations. Promptement le site s’organise. La position de tir est aménagée en marge de la falaise. Plusieurs plates-formes taillées dans le rocher complètent le dispositif d’observation du pylône métallique qui s’élève à proximité à 4 mètres de haut. Un baraquement, dont la présence n’est pas attestée, devait servir de bureau d’étude et de cantonnement. Mais au fait, pourquoi ici au Prégentil ? Les projectiles devaient être tirés en l’air à la verticale et leur trajectoire, étudiée et analysée pendant le parcours, se terminait forcément sur des cibles peu éloignées du canon. Il fallait également observer les conditions de tir en altitude pour être au plus près de la réalité. La falaise du Prégentil avec ses 1938 m d’altitude et près de 1000 m de dénivelée à l’aplomb remplissait toutes ces conditions. Les cibles disposées au fond des ravines du Saint-Antoine étaient, horizontalement très près du lanceur et très éloignées verticalement. La menace était minime pour les observateurs. Pour tout vous dire, Helbronner connaissait très bien l’Oisans pour y avoir fait des mesures géodésiques très poussées. Le 3 juillet 1905 il avait implanté, avec le guide Ginet d’Allemont, un signal géodésique au sommet du Prégentil et le site lui était familier. On ne connaît pas le résultat de ces expérimentations interrompues par l’armistice du 11 novembre 1918 et qui mettait fin à cette effroyable guerre. Mais peu nous importe. Nos poilus allaient rentrer, le cauchemar était enfin terminé. Peut-être faut-il voir dans cet événement extraordinairement heureux, qui éclipsait tous les autres, le fait que la mémoire collective ait complètement oublié cette campagne de tir expérimental.
André Glaudas

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Vue du Prégentil

Document Gallica :
Titre : Champ de tir du Bourg-d’Oisans
Éditeur : Service géographique de l’Armée (Paris)
Date d’édition : 1922

 
 

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