Témoignages de Michel

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Modérateur : Valérie

Jean-François
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Message par Jean-François » 30 déc. 2007, 14:21

Pourrait-on rassembler en une sorte de calendrier des dictons en rapport avec le jardinage ou les activités agricoles ?

Michel
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Message par Michel » 31 déc. 2007, 13:46

Ces 2 opérations effectuées, une période de tranquillité relative arrivait.

Bientôt il faudrait songer à sortir les bêtes de leurs étables après un long hivernage.
En premier, venaient les brebis… accompagnées de leurs jeunes agneaux nés durant l’hiver.
Les mères s’étaient vues débarrassées de leur laine dans le courant du mois de Février, aussi avaient elles une toison de 2 mois seulement, à peine plus abondante que celle de leurs agneaux…
Quelques semaines encore et ce sera la sortie des vaches.
Dans cet intervalle de temps, il est nécessaire de procéder à la remise en état des chemins (et ils sont nombreux, de Charvet, du Bois…), à la réfection des canaux, du réservoir des Lames…
Toutes ces activités relèvent de « corvées » auxquelles participe chaque famille.

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Aubergère
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proverbe

Message par Aubergère » 07 janv. 2008, 17:23

Michel, voici un proverbe local qui me vient à l'esprit :
"Tant qu'il y a de la neige à Comba-Bouz', inutile de commencer le jardin !"
Je l'ai souvent entendu, certains le cite encore et il me semble bien facile à comprendre.
Aubergère.

Michel
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Message par Michel » 08 janv. 2008, 13:24

Durant la journée, les enfants ou adolescents plus ou moins « mobilisés » à l’exécution de différents travaux, accompagnaient leurs parents dans les champs.

Dans la soirée par contre, le lieu de rassemblement se situait à la fontaine de la partie haute du village, véritable place publique. Discussions, jeux, y avaient lieu, avec la participation des habitants des maisons voisines, car en l’absence «d’eau sur l’évier », ces derniers s’approvisionnaient à … "la tire ".

J’ajoute qu’en cette circonstance, une brave mère de famille originaire du hameau mais «partie à la ville », ne se privait pas, lors de chacun de ces retours annuels «au pays», de souligner les éléments de confort dont elle bénéficiait désormais. Parmi ceux-ci figurait bien sûr «l’eau à la pile» (eau froide et eau chaude évidemment !) révélation qui, au début des années 50, impressionnait les habitants du hameau.

La «tire », ce bassin cylindrique constitué d’épaisses douves de mélèze assemblées au moyen de 2 cercles métalliques, de dimensions imposantes, (2x2 m) était alimenté par l’eau sortant d’un tronc de mélèze disposé verticalement.
Le trop plein de la tire alimentait en aval 2 bassins parallélépipédiques en bois. Ces derniers servaient indifféremment au lavage des légumes, à maintenir au frais les bidons de lait, au rinçage de la lessive et, matin et soir, d’abreuvoir pour les vaches. Le passage de ces dernières, véritables pompes aspirantes, avait pour conséquence une impressionnante baisse du niveau d’eau…


J’ai dit que les adultes se rencontraient également en ce lieu fort animé et il en résultait des conversations multiples entre «les locaux», les « travailleurs émigrés » et la descendance de ces derniers.

Certainement faut-il voir dans ces « conciliabules » la raison pour laquelle je délaissais jusqu’à l’oublier, tout lien avec mon environnement habituel de l’année scolaire. Toutefois, je fus le seul à pouvoir prolonger jusqu’à mon arrivée à l’âge adulte, le privilège de cette double vie. Ceci fut rendu possible par mon statut de lycéen d’abord, d’étudiant sursitaire ensuite. Ce ne fut pas le cas de mes compagnons de jeux entrés plus tôt dans la vie professionnelle.

Certes les jeux occupaient-ils (tout au moins pendant les 1ères années) la majeure partie de notre temps passé là haut. Les années passant, il est évident que cette activité fut remplacée par une participation de plus en plus importante aux nombreux travaux réservés jusqu’ici aux adultes

Lucien
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Message par Lucien » 28 janv. 2008, 12:42

Lucien corrige ou valide le texte de Michel :


Par ailleurs, il est à même de déterminer, plusieurs semaines à l'avance, le temps qu'il fera au printemps comme à l'automne, selon qu'il brille ou ne brille pas pour la...Chandeleur ou lors du dernier jour d'Août! "Le souleu si coudja cla le dariè daou,nou zouleun un bel undariè" !

Effectivement la vie se poursuivait au rythme des saisons, ces dernières se succédant de "Rogations" en "Saints de Glace", de Lune Rousse (celle qui suit la lune de Pâques !) en « été de La St Martin » en passant par «l'hiver de La St Jean » …

Dans cette agriculture vivrière basée sur la polyculture et le petit élevage, toute l’activité était basée sur le calendrier. Avec l’arrivée des beaux jours, les terres les plus basses, débarrassées en premier de la couche de neige, voient redémarrer l’activité.
Modifié en dernier par Lucien le 28 janv. 2008, 12:44, modifié 1 fois.

Lucien
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Message par Lucien » 28 janv. 2008, 12:43

Il fallait refaire un mur en pierres sèches, éboulé au pied d’un champ et obstruant un chemin, couper les buissons gênant le passage sur ce dernier, et constituer des fagots ou «faissines » qui, après séchage, constitueraient d’excellents appoints lors de l’allumage du four à pain…

En ces lieux où les cailloux abondent, il fallait éliminer, à la main, ces derniers des champs de luzerne en vue de préserver le" fil" de la faux en Juin prochain.

Il était nécessaire également de lutter contre ce fléau qui veut qu’inexorablement la terre des parties hautes du champ soit attirée vers le bas.
« Tirer broue « cela signifiait l’ouverture, au bas du champ, d’une tranchée de 80x20cm d’où l’on extrayait la terre à remonter à l’aide de tombereau ou de « cavagnes» (à bât dans ce dernier cas) vers la partie haute.

Dans les cas les plus défavorables, lorsque par exemple la largeur du champ était trop faible et ne permettait pas la manœuvre du cheval et de sa caisse, cette dernière était remplacée » par les «cavagnes».
Il s’agissait d’une panière en reutche que portaient les adultes !

A ces « petits boulots » succédaient ceux "plus nobles" consistant en la préparation des labours destinés aux semées de printemps d’une part (orge et avoine), à la plantation des patates d’autre part.

Les céréales d’hiver (seigle et froment) avaient été, semées à l’automne précédent (à la St Maurice pour le seigle) c'est-à-dire aux alentours du…23 Août (« pour en avoir à son caprice») !


Les semées d’automne ont passé l’hiver sous la neige, protégées du gel, ou au contraire, pourries par un excès d’humidité, elles sont à refaire. Il en va de même si, en cas de manque de neige, elles n’ont pas résisté au gel.
Pratiquement chaque printemps voit se dérouler un labour particulier... Il s'agit de signer la fin d'une prairie artificielle (sainfoin ou luzerne) qui a "fait son temps". "Casser pré", tel est le nom réservé à cette opération, se fait à cette époque de l'année où l'humidité du sol, humidité laissée par la fonte de la neige, facilite ce genre de labour.

Deux mules sont alors attelées à la «grosse charrue » réservée à cet usage et il faut bien cette "double traction" pour venir à bout des imposantes racines de luzerne…

A la même époque, il faut préparer les jardins qui produiront salades, haricots, carottes et petits pois.

Mais "rien ne presse ; tant que la neige est encore au Chien, il est trop tôt pour semer".
Et puis, il y a la "lune rousse" dont il faut se méfier, ainsi que des "saints de glace"… Il faudra aussi ne pas oublier les "choulières", ces minuscules parcelles de terre situées à proximité des maisons ; chaque famille en possède une ou deux, voire plus.
Au fil des partages successifs elles ont vu leurs surfaces se réduire ; parfois elles ne dépassent pas 30 m² ! Elles accueilleront poireaux, betteraves, carottes rouges, choux...
Et Novembre arrivé, tous ces légumes rejoindront au niveau moins 1 de l'habitation, en pleine terre et à l’obscurité, le"caveau" d'où ils seront retirés au fur et à mesure des besoins.

La préparation des terres devant accueillir les patates, légumes de base de l’alimentation familiale (gens et bêtes confondus), vient ultérieurement.
La plantation des semences, rigoureusement sélectionnées, interviendra début Juin afin de minimiser les risques de gelée.
Toutefois, ces risques ne sont jamais totalement exclus, car il est connu qu’à cette altitude, durant les fatidiques 100 jours nécessaires à leur développement, des gelées sont susceptibles de se produire.
Les semences avaient été conservées pendant l’hiver à l’obscurité, à la bonne température afin que les germes soient « à point ».

Il y avait les « rattes » réputées pour être les meilleures, mais également les plus capricieuses au moment de la récolte ; venaient ensuite « les Bintje » à peine moins réputées mais également « fantasques » en ce qui concernait leur rendement ; les « Belles de Fontenay », de Lacronan, connaissaient une certaine faveur, la" Ker Pondy" constituait une valeur sûre.

Il faut toujours que les plans descendent. Par exemple, il faut aller chercher les plans à Besse…

La comparaison de leurs mérites respectifs alimentait en tout cas de nombreuses conversations et si la réalité n’était pas à la hauteur des espoirs annoncés par la " bonne façon " ("elles ont de la belle herbe" disait on !) de la partie visible observable pendant … les 100 jours, cela était imputable au " changement de semence" qu’il faudrait pratiquer chaque année…

Ces 2 opérations effectuées, une période de tranquillité relative arrivait.

Bientôt il faudrait songer à sortir les bêtes de leurs étables après un long hivernage.
En premier, venaient les brebis… accompagnées de leurs jeunes agneaux nés durant l’hiver.
Les mères s’étaient vues débarrassées de leur laine dans le courant du mois de Février, aussi avaient elles une toison de 2 mois seulement, à peine plus abondante que celle de leurs agneaux…
Quelques semaines encore et ce sera la sortie des vaches.

Lucien
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Message par Lucien » 28 janv. 2008, 12:51

Les premiers jours de mai arrivent et il est temps de sortir les vaches de l’humidité de leur étable où elles séjournent depuis plus de 6 mois, selon les années…
Opération oh combien folklorique d’ailleurs !
Il faut avoir assisté aux premiers ébats de ces bêtes brusquement exposées à une lumière à laquelle elles ne sont plus habituées.
Passe encore pour les mères, mais les veaux nés pendant l’hiver se livrent à toutes les excentricités.
Leur accoutumance à la vie au grand air se fait graduellement : quelques heures par les chemins autour du hameau, une demi-journée à proximité ensuite…

Et c’est enfin leur conduite quotidienne dans les terrains privés où elles seront gardées par leur propriétaire.
Une des plus grosse ferme possédait de 10 à 15 vaches.
Durant ces journées d'accoutumance, les bêtes excitées par les mouches et les taons dont c'est la pleine période, sont comme folles !

Il faudra bien que s'écoulent 2 semaines pour qu'elles se calment !...

Le 11 juin, les gens emmontagnaient. Ils emmenaient vaches, moutons à l’Alpage où un gars du pays gardait les vaches jusqu’au mois de septembre (4 ou 5).

Au Freney, Jules Pellorce, l’ancien Maire, gardait les bêtes du village du Freney d’Oisans et du village voisin d’Auris.

Michel
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Message par Michel » 22 mai 2008, 22:12

La fenaison à peine achevée, du moins dans les " prés du bas " (tous artificiels ) par opposition aux prairies naturelles " du haut " , c'est-à-dire de Charvet, il faut songer à moissonner les 2 ou 3 champs de seigle ensemencés… à la fin du mois d’ Août de l’année précédente. Je ne peux parler de cette première récolte venant à maturité aux environs du…14 Juillet sans avoir présente à l’esprit l’image de ces semées de seigle lors des derniers jours du précédent mois d‘Août. En effet, une dizaine de jours après le labour de ces champs laissés une année durant " en guéret "(jachère), afin que la terre « se repose », les semées de seigle offrent une inattendue couleur rouge. Celle-ci sera remplacée par la plus classique couleur verte quelques jours plus tard. Je pense qu’il n’est pas inutile de s’attarder à la description de la moisson du seigle dont les 2 débouchés sont constitués d’une part par le grain, lequel sera utilisé pour la confection de farine animale (la "pidance") et d’autre part, par la paille. L’utilisation majeure de la paille de seigle l’était sous la forme de litières dans les étables, mais un sort plus noble était réservé à la « plus jolie »…

La moisson du seigle, c’est « quelque chose » ! Tout commence avec "le dailleur " (l’homme à la faux). Celui-ci s’adjoint…"l’homme à la barre " , qui, muni d’une perche en bois, accentue le penchant naturel des tiges, et oriente ces dernières dans une direction rendant plus aisé leur fauchage… Cette opération (" tenir la barre ") m’était généralement réservée. Une tierce personne "cueillait", c'est-à-dire relevait la paille coupée pour la mettre en gerbes qui seraient liées, avant d’être assemblées, par 12, en "bourles" (ou « moyettes ».) La partie supérieure de ces dernières recevait un lien en paille, maintenant réunies les 12 gerbes dont les épis s’inclinaient au fur et à mesure du séchage. Celui-ci réalisé, la récolte rentrée dans la grange, avait lieu le battage. Par temps sec, une dizaine de jours tout au plus, séparait la moisson de la rentrée de la récolte. Par contre, lors d’étés pourris, tout séchage posait problème, aussi bien celui des foins qui pourrissaient sur place après le fauchage, que celui des céréales. Ne manquait alors pas l’évocation de l’année du décès de telle personne bien connue dans la commune, année où les " têtes des bourles "avaient germé » tellement il avait plu !...

Cette dernière opération du battage se déroulait en 2 étapes. Au cours de la 1ère, l’essentiel du grain était extrait en frappant vigoureusement la partie de la gerbe présentant les épis sur une paroi verticale. " L’ébarbage " effectué, les gerbes étaient alors ouvertes et disposées en un anneau sur l’aire pour y être soumises à l’action du fléau. Il m’arrivait de me glisser dans le trio d’adultes, experts dans l’art du maniement au bon rythme de cet outil, dégageant alors un son bien régulier. Je ne réussissais qu’à briser cette belle harmonie, n’étant jamais parvenu à… «marcher au pas ». La paille ainsi dépouillée de la totalité des derniers grains qu’elle pouvait contenir encore, était soigneusement empaquetée en "cloisses". Les plus réussies de ces dernières constitueraient la matière première utilisée lors des soirées d’hiver dans le rempaillage des chaises ou la confection de récipients de formes diverses, les fameux "paillassons ". Ceux-ci seraient destinés à contenir les fèves, le grain pour les poules, ou le son pour les lapins…

La moisson de la céréale majeure, celle du froment avait lieu dans la foulée, c'est-à-dire fin Juillet-Début Août, alors que survenait l’époque de la fenaison dans les " prés du haut ". Je parlerai ultérieurement de celle-ci, bien que la moisson du blé et " l’épisode Charvet " se soient toujours télescopés. La faucille remplaçait la faux (la trop faible hauteur des tiges de froment ne permettait pas l’emploi de cette dernière !) durant de nombreuses journées, car c’était une affaire de longue haleine .Tenir la barre n’était plus pour moi la tâche que je redoutais le plus ; par contre je n’ai jamais oublié les gerbes qu’il fallait " lier", les champs qu’il fallait glaner (recueillir soigneusement les moindres brins de paille qui avaient pu s'échapper des gerbes, "cela faisait plus propre" nous disait on !), après que les gerbes aient été assemblées en « bourles ».

A la moisson « des froments » succédait celle des 2 champs d’avoine dont les grains étaient utilisés tout comme ceux du seigle dans la fabrication de la " pidance " ou comme « dopant » pour mules et mulets. La paille d’avoine quant à elle intervenait conjointement à celle du froment dans la confection de la « mêlée ». Mais avant d’en arriver à ce stade, il avait fallu rentrer ces récoltes, ce qui au niveau des granges, n’allait pas sans poser quelque problème lorsqu’il avait été impératif de s’occuper de quelques autres « menus produits » constitués par l’orge, les lentilles, les fèves, éventuellement le chanvre, voire cette légumineuse, voisine des lentilles, c'est-à-dire les " aires " utilisés dans l’alimentation des lapins et des poules…

Survenait alors …le grand jour du battage du froment et de l’avoine stockés sur les aires de battage respectives, et un peu à l’écart celui de l’orge. La faible importance de cette dernière céréale, (de l’avoine également) rendait l’expression « faire aller la machine » parfaitement justifiée ! En effet, la machine en question consistait en une batteuse actionnée par... 2 paires de bras vigoureux ! Le battage du froment en quantité beaucoup plus importante s’effectuait lui, au moyen d’une batteuse dont le principe était le même, mais actionnée elle par un moteur à essence dans un premier temps (le même que celui utilisé pour actionner scie circulaire et scie à ruban dont j’ai déjà parlé) par un moteur électrique ultérieurement. Ce jour où "la machine allait " était incontestablement un grand jour et constituait l’un des temps forts de l’été. En raison du nombre de bras nécessités par l’opération, les « renforts » requis (7 ou 8 personnes) se retrouvaient à cette occasion : mon grand-père, l’oncle Henri et la tante, ma mère et ses 2 sœurs auxquelles se joignait un de leur frère, et mon père. La tâche dévolue à chacun était bien définie.

En premier lieu venait l’introduction des gerbes dans la " machine " ; cette opération, (la moins pénible), avant de la réaliser moi-même, a été pendant de nombreuses années dévolue au grand-père. Elle se signalait par la quantité de poussière ingurgitée, surtout si le blé avait été victime, malgré le traitement à la chaux effectué lors des semailles, de …la maladie "du charbon". Grain et paille étaient crachés à l’avant de la machine et pour séparer ces 2 constituants, 2 personnes s’activaient avant de transmettre aux bras (généralement ceux de ma mère et des tantes), la paille à assembler en « cloisses » évacuées momentanément au dehors de la grange. Dure journée que celle-ci commencée aux aurores (à l’heure à laquelle partait le premier autorail ! ) pour se terminer à la nuit tombante avec l'empilement des « cloisses » sur les « plans » , parties hautes des granges.

Cependant, le plus fastidieux (pour moi) restait à faire… Je veux parler de l’opération « vannage »ou vantage. Cette opération au cours de laquelle le grain était séparé de son enveloppe, des débris de paille et d’épis, était réservée aux journées pluvieuses durant lesquelles le travail à l’extérieur n’était pas possible. Ce travail, oh combien ennuyeux, se déroulait plusieurs jours durant, voire une semaine… Autour du vannoir (le tarare), 3 personnes se trouvaient mobilisées. L’une d’elles actionnait la manivelle entraînant les ailes productrices du vent, une deuxième alimentait la grille sur laquelle s’effectuait la séparation du grain de ses résidus, alors qu’une troisième effectuait la tâche la plus noble, la récupération à l’avant, au moyen de " quartières " ou de « doubles », du grain avant que celui-ci soit accueilli dans des sacs en toile de lin blanche, « les sétiers », d’une contenance de 58 l.

La finalité de toutes ces opérations était la production de farine pour les bêtes et surtout la fabrication du… pain. Lorsque je songe au nombre d’heures nécessaires à l’obtention du produit final, je ne peux que rester confondu. Des labours d’automne à la récolte de ce grain si précieux, de quels soins ce dernier n'avait-il pas été l'objet ! Au moment des semailles, ce grain avait été « chaulé » c'est-à-dire mis au contact d’un lait de chaux. Celle-ci avait elle-même été obtenue au moyen des fours à chaux artisanaux qu’il avait fallu construire rationnellement. Ce traitement était destiné à prévenir les maladies pouvant compromettre la récolte future (en particulier celle du chardon). Que d’efforts à fournir avant de conduire cette dernière aux Moulins de la Guisane ou de préférence au Moulin Chabas, installé à peine plus loin sur la Durance. Car de la quantité de grain récoltée dépendaient les quantités de farine et de son récupérées ; ce dernier sous-produit étant utilisé dans l’alimentation du bétail.

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yo
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Message par yo » 23 mai 2008, 07:39

Voici la première partie du texte rédigé par des membres de l’association Frénétique (Lucien, Cyrille, Brigitte, Jean-François, Denise, Paula, Anne-Marie, Lionel).
Bonne lecture.

Printemps :
Il fallait préparer les terres de semences (blé, pommes de terre) ;
Il fallait refaire les murs en pierres sèches, éboulés au pied d’un champ et obstruant un chemin.
Remonter la terre de bas en haut avec des cavagnes ou à bât de mulet avec les pariers. (Charrier la broue). Il était nécessaire également de lutter contre ce fléau qui veut qu’inexorablement la terre des parties hautes du champ soit attirée vers le bas.
Pour fertiliser les sols, il était indispensable de porter le fumier dans les champs (foumorger) à l’aide du bayard (il s’agissait d’une caisse à 3 côtés seulement pourvue d’un brancard à chaque extrémité, que portaient 2 personnes) ou des bissaches ou des tombereaux. Le fumier était épandu.
En ces lieux où les cailloux abondent, il fallait éliminer, à la main, ces derniers des prés. Les pierres étaient entassées sur les côtés formant des clapiers.
Ensuite il fallait ratisser les champs à l’aide d’un râteau pour enlever les feuilles, les branches, et égaliser les taupinières.
Le temps était venu de faire les barloques ou berloques (corvées payées par la commune de remise en état des chemins muletiers, des ponts, des ruisseaux, des murs, des combes et rigoles).
Après l’hivernage, les bêtes sortaient progressivement (débronner) de l’écurie en attendant l’estive. (enmontagnage le 11 juin)
Aux premiers beaux jours de mai, à ces « petits boulots » succédaient ceux "plus nobles" consistant en la préparation des labours destinés aux semées de printemps d’une part (orge et avoine), à la plantation des patates d’autre part.
Toujours jeter un œil sur l’almanach pour les dictons et la phase lunaire exemples : les Saints de glace,
« Ne pas faire de jardin tant qu’il y a de la neige en l’Outre ». (Clavans)
Histoire de chien et chèvre (Auris)
Les céréales d’hiver (seigle et froment) avaient été, semées à l’automne précédent (à la St Maurice pour le seigle) c'est-à-dire aux alentours du…23 Août « pour en avoir à son caprice» !
En plus de ces activités, il fallait garder les troupeaux (vaches, chèvres, moutons). Ce travail était souvent réservé aux enfants. Au moment de la récréation, la maman de Lucien venait demander l’autorisation à la maîtresse pour qu’il puisse quitter l’école pour aller garder les bêtes.

Été :
L’été les troupeaux sont en alpage. Toutes les activités agricoles étaient concentrées aux fenaisons. Le matin à la levée du jour, les hommes partaient faucher à la daille (faux). Les femmes, après avoir fait le travail d’intérieur, trait la vache, soigné les poules et le cochon, livré le lait, elles rejoignaient les hommes vers 9 heures avec le mulet et la charrette. Elles n’oubliaient pas le casse-croûte qui était composé d’un meurçon, d’un bout de lard, de patates et de fromage. (cerasson).
Après la pause, il fallait retourner les andins fauchés les jours précédents.
Une fois, le foin sec, il fallait confectionner les ballons. Ce sont des brassées de foin insérées dans trois cordes reliées par un bâton. (Photo)
Ces ballons étaient chargés sur la charrette. Bien respecter la charge afin que le mulet puisse tirer l’attelage. Le repère était fixé ainsi : 12 ballons par charettée, le ballon pesant 40 kg environ. Quand les prés n’étaient pas accessibles en charrette, le transport était effectué à dos de mulet.
Le bât est équipé de quatre crochets de bois, sur lesquels venaient s’arrimer les ballons de foin. Le mulet ainsi bâté, le muletier venait jusqu’à la grange pour décharger les ballons avant de les étendre sur la « moute » (empilement du foin dans la grange). Quand le foin était rentré encore « tiet » (légèrement humide) il fallait répandre du sel pour éviter la fermentation. On disait : saler la moute.
Faire les foins, durait jusqu’à la maturité du blé (15 août).
Moissonner se fait de deux façons. La moisson du blé se fait à la faucille (vourlame) et le seigle couché à la faux. Il fallait rassembler le blé en gerbe C'est-à-dire lier un petit fagot de blé avec un lien fait avec les plus grandes pailles. Ces gerbes sont rassemblées pour constituer un premier cône, chapeauté par un deuxième cône de quatre gerbes servant de parapluie. La « bourle » était ainsi constituée. (Photo). Lorsque le blé était bien sec, il était rentré à la grange sur l’aire. A temps perdu ou par temps maussade, l’opération du battage arrivait.
Battre consiste à extraire le grain de l’épi et garder la paille. Les grains servaient à faire la farine, du complément d’aliment pour les bêtes et pour la prochaine semence. La paille était stockée sur le planchette en attendant d’être utilisée pour la litière ou pour fabriquer les giboules, les ruches, les corbillons, garnir les bâts et les colliers de mulets .
Cette opération de battage se fait de plusieurs manières.
La plus simple consiste à taper les gerbes contre une lauze fixée au mur pour faire tomber le grain.
La deuxième, au fléau. Outil de deux pièces de bois, dont la plus grande servait de manche, étaient reliées par une articulation en cuir. Quatre hommes des plus habiles frappaient en cadence sur les gerbes étalées sur l’aire. Les femmes ramassent alors la paille, les gosses le grain dans les corbillons, en attendant d’être vanné.
La troisième, plus moderne et surtout plus efficace, se pratiquait avec la batteuse à bras. Deux costauds actionnaient les manivelles qui entraînaient un tambour équipé de couteaux, qui agissait comme des peignes pour séparer les grains de la paille. Le grain tombait directement dans le corbillon, tandis que la paille était conditionnée en ballots.

Quand le grain est séparé de la paille, il reste à le vanner pour extraire le son et les pources (poussière) afin de le rendre propre pour le transformer en farine.

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Caroline-Maison
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Re: Témoignages de Michel

Message par Caroline-Maison » 15 nov. 2010, 16:55

Bonjour,
je profite du temps libre que j'ai pour vous passer un petit coucou à tous.
je sais que se n'ai pas dans le thème :oops: mais bon.

BONNE ANNEE A TOUS !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

à bientôt Caroline.

::langue:: ::langue:: ::langue:: ::superking:: ::++:: ::++:: ::++:: ::++::

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Audrey I
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Re: Témoignages de Michel

Message par Audrey I » 15 nov. 2010, 17:37

Coucou comment vas-tu ???
CM2

Verrouillé