Journal intime enfant du colporteur

[Jeanne]

Lundi 14 mai 1907

En ce moment, j'écris en compagnie de Charles. Il s'endort tranquillement, au chaud, dans son berceau qui a servi toute la famille. Il ne peut bouger, emmailloté de la tête aux pieds! S'il pleure, je le berce doucement avec le pied. Quand il est sale, je change son linge. C'est moi qui m'occupe de mon frère parce que maman a beaucoup de travail.

[Jeanne]

Mardi 15 mai

Aujourd'hui Georges emmène le chien Médor garder les moutons dans le pré à côté du village.
Papa harnache le mulet Fallet.
Il pose le licol et le mors, les oeillères sur la tête.
Il attache le collier autour du cou.
Dans le champ, Fallet tire la charrue.
Ca retourne la terre...
Le pauvre Fallet !
Il laboure toute la matinée...

[Jeanne]

Vendredi 25 mai

Je ne vais pas à l'école.
J'aide Georges, Aimé, papa et pépé à planter les patates.
Il fait chaud, c'est dur. Pendant ce temps, maman s'occupe de la maison et surveille Charles et Léa.
Je ramasse les pierres avec pépé Pierre.
Hier, Fallet a tiré la herse.
Papa a pris la semence de pommes de terre qu'il avait gardée depuis l'automne dernier.
Pépé et moi, nous tirons le fil du cordeau.
Papa creuse les raies parallèles.
Pépé, fatigué, s'asseoit et boit.
Je plante une patate tous les 30 cm à peu près.
Pas trop profond: elle n'entendrait pas les cloches!
Georges recouvre les sillons.
Aimé prépare le canal pour irriguer.
Ouf, quelle journée

[Jeanne]

Samedi 2 juin 1907

En revenant de l'école, je suis allée au jardin pour voir ce que nous avions planté.
Les patates ont commencé à pousser.
Je savais bien qu'elles avaient entendu les cloches !
J'ai cueilli les fraises rouges et les ai apportées à la maison.
Au dîner, nous les avons mangées, elles étaient délicieuses !

[Jeanne]

Lundi 4 juin 1907

Aujourd'hui, comme chaque année, nous accompagnons l'oncle Jules.
Il restera tout l'été dans la bergerie d'alpage, au Gua, près de la rivière Sarenne.
Toutes les semaines, je monterai des provisions à oncle Jules avec Fallet, notre mulet. Oncle Jules sera ravi et moi aussi de nos retrouvailles en pleine montagne.
A mi chemin,au col de Cluy, je me reposerai.
J'admirerai le paysage : le Pic Blanc, la mine de l'Herpie, la tête de chien, l'oeil de la Muzelle, la Meije, les dents du Râteau, le glacier de Mont de Lans...
Je garderai toujours l'odeur des fleurs ( génépy, orchidées, marguerites, edelweiss, boutons d'or, narcisses, troll, asphodèles, gentianes, violettes, pensées...)
Je repartirai vers la Sarenne.
J'arriverai au Gua, tranquille, et je retrouverai mon oncle, ses moutons, son cochon, ses poules, ses vaches, son chien préféré Dick.

[Jeanne]

Lundi 18 juin 1907

10 heures du soir, bergerie de la Courbe.
Je suis triste: je regarde en bas le village, ma maison. Une grosse larme coule sur ma joue.
J'entends les cloches... et au loin, l'orage qui gronde.
Papa m'a accompagnée hier à la bergerie où je garderai seule les moutons quelques jours.
Je me souviens avec grand plaisir de notre soirée.
J'ai demandé plein de choses à papa.

" Où dors-tu, pendant l'hiver, durant ta saison de colportage ?

- A l'hôtel de Moulins ou parfois dans les familles qui m'accueillent ou même à la belle étoile...

- Qu'as-tu dans ta balle?

- Des lunettes, des coupe-choux , du savon, des boîtes de toutes sortes, des petits livres de prière, des dentelles, des boutons pressions, des boutons décorés de toutes tailles de toutes couleurs, des gros tissus, des peignes à chignon, des épingles, des barrettes, des bijoux pour décorer les robes, des chapelets, du fil, des aiguilles, ( de la mercerie) , un mètre pliant, un tout petit porte-monnaie, des oeillets, des biscuits purgatifs, des habits, des médicaments pour la colique, pour la constipation, des serviettes brodées avec des initiales, des boîtes de présentation, des graines, des dés à coudre..."

[Jeanne]

Mardi 19 juin 1907

Je suis déçue de ne pas aller à l'école : quand j'y retournerai, les autres sauront faire des choses que moi je ne saurai faire. Plus tard, je voudrais travailler, pas comme maman qui reste tout le temps à la maison. Je ferai sage-femme, fermière ou institutrice... Je ne sais pas encore quel métier mais pas bergère ni mère au foyer ! Il faut aussi que je pense à ma maison ! Et combien aurai-je d'enfants ? Ouh là là ! Ce serat dûre quand je serai grande !!

[Jeanne]

Mardi 19 juin 1907

Je suis triste...Je ne peux plus aller à l'école.
Je ne pourrais plus voir Henri mon amoureux.
Mais je suis assez contente d'aller en montagne avec mes moutons.
J'aime bien être en montagne pour voir le paysage, garder mes moutons
et penser à autre chose. Quand je serai grande, j'aimerais bien me marier avec Henri comme il est
riche et très beau. Ses parents ont l'air sypathiques. Et ausi de faire 5 enfants avec lui.
Je pense qu'Henri fera le métier de son père. Moi je serai maîtresse.

[CamilleM]

Bonne rentrée Jeanne.

[Jean-François]

Les cahiers de Jeanne n'étaient plus accessibles. La réactivité de Lionel a été comme d'habitude remarquable !
Et voici son message :

Bonjour Jean-François.
Voici le lien pour retrouver les cahiers de Jeanne :http://freneydoisans.com/freneytique/en ... olporteur/
J’ai utilisé un module payant pour récupérer et afficher les cahiers qui était en Flash, une technologie qui ne fonctionne plus sur internet. Maintenant les cahiers sont dans un code HTML5, et ne devraient plus poser de problème à la consultation.
Bonne journée.

Lionel

[Jean-François]

Après toutes ces années, les carnets de Jeanne ne s'ouvraient plus...
J'ai signalé le problème à Lionel qui a immédiatement réagi comme toujours !
Voici son message :

Bonjour Jean-François.
Voici le lien pour retrouver les cahiers de Jeanne.

J’ai utilisé un module payant pour récupérer et afficher les cahiers qui étaient en Flash, une technologie qui ne fonctionne plus sur internet. Maintenant les cahiers sont dans un code HTML5, et ne devraient plus poser de problème à la consultation.
Bonne journée.

Lionel