Installation de George de Layens à Huez

INSTALLATION DE GEORGES DE LAYENS À HUEZ
Source :
Archives André Glaudas. 
Extrait du texte « souvenir d’hivernage » de Gaston Bonnier,
Membre de l’Académie des science.

Sur le même sujet :
Georges de Layens, apiculteur et ermite à Huez

Voici comment George de Layens raconte, dans une lettre à sa mère datée du 15 avril 1869, sa visite à Huez et sa première entrevue avec l’abbé Baffert, qui allait devenir bientôt un de ses plus précieux auxiliaires en apiculture :

La ville autour de laquelle je rayonne pour chercher à établir mes expériences est le Bourg-d’Oisans (Isère), où tu pourras m’écrite passe restante jusqu’à nouvel avis.

Avant-hier première excursion à 50 mètres au-dessus du niveau de la plaine.
J’engage la conversation avec un paysan qui montait vers son village, et comme il me propose d’aller avec lui, je marche sur ses traces. Il avait à chaque main un gros panier qui montant transmuent par un sentier qui mérite à peine ce nom, car on n’a même pas la place de mettre un pied devant l’autre, de rocher en rocher, sur le bord d’une belle cascade qu’on nomme cascade de Sarenne. Au bout de cinq minutes, le paysan se retourne pour me regarder et me dit : « Je crois que vous n’avez pas la tête ». Je suis réponde que la tête est solide, mais que le pied n’est pas encore montagnard. Par conséquent comme je n’ai pas envie de me casser le cou, par amour propre, je lui souhaite bon voyage en le remerciant, et je le suis des yeux grimpant tranquillement sur le rocher à pic, avec ses deux paniers au bras.

Il faut ajouter à la difficulté de ce chemin (?) une chaleur de 35 degrés, un soleil Ardant qui rend les rochers si brûlants qu’on peut à peine s’y cramponner. J’ai su du reste, hier, que le sentier en question est connu pour être dangereux et difficile ; c’est un raccourci pour aller aux hameaux de l’Argentier, et même tous les gens du pays n’y passent pas.
Voilà comment s’est terminée ma première ascension dans les Alpes, à 50 mètres au-dessus de la plaine.

– Hier, seconde excursion, à 2200 mètres d’altitude.
En partant hier matin, après avoir absorbé un litre et demi de lait de chèvre, je pensais que si pour monter dans les pâturages alpins, il fallait grimper par des sentiers dans le genre de celui que la veille, je serais vite en chemin de fer dans la direction de Paris. Heureusement, j’étais tout à fait dans l’erreur et rien n’est plus facile que de s’élever même sans grande fatigue, à une altitude considérable, et de jouir de tout ce que l’on peut voir de plus beau dans les Alpes, au milieu des fleurs les plus variées qu’on puisse imaginer.
Hier donc, je suis parti dès le premier matin pour un petit village appelé Huez et qui est situé presque à 1500 mètres de hauteur. Je me suis simplement présenté chez le curé de ce village (l’abbé Baffert), pour solliciter de son obligeance quelques renseignements sur les environs. J’ai été parfaitement reçu par lui, et il a même voulu à toute force me faire servir une petite collation à mon retour des pâturages.

J’ai passé toute ma journée à aller d’un chalet à une autre, et partout parfaite réception (ce qu’on me disait de l’hospitalité proverbiale des habitants de l’Isère et tout à fait exacte). J’ai été jusqu’au chalet le plus élevé, à plus de 2000 mètres d’altitude, et j’y ai goûté du beurre frais remarquablement bon avec un fin goût de plantes alpestres.
J’ai bien envie d’établir mon premier rucher dans un de ces chalets.

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