LA HOUILLE BLANCHE EN OISANS
Le Petit Marseillais, 22 octobre 1908.
On nous écrit de Grenoble, le 20 octobre :
Les lecteurs du Petit Marseillais connais sent les principales installations hydro-électriques réalisées depuis quelques années en Dauphiné, notamment celles du Drac, de la Romanche et de la vallée du Grésivaudan, dont ce journal a publié des descriptions.
On a capté, dans notre région, plusieurs centaines île mille chevaux de force, et cette énergie rayonne jusqu’au delà de Lyon, dans l’Ardèche, etc. Et l’on capte toujours de la force sur les flancs et au pied de nos montagnes neigeuses ; les glaciers alpins sont tributaires de notre industrie.
Parmi les conquêtes nouvelles sur la nature inépuisable, je veux citer celle que réalise en ce moment, en plein Oisans, la Société hydro-électrique de l’Eau-d’Olle.
Depuis le mois de juin dernier, quelques centaines d’ouvriers ont entrepris, sous la direction de M. Maurice Bergès, ingénieur, l’un des fils de feu M. Bergès qui créa la houille blanche (le mot et l’utilisation de la chose), de capter l’important ruisseau qui a nom l’Eau-d’Olle, affluent de la Romanche impétueuse.
Les travaux sont menés avec une telle énergie que déjà 7 kilomètres 500 de canalisation en montagne sont près d’être terminés, ainsi que l’usine génératrice dont on pose, cette semaine, la toiture.
Au mois de juin prochain, cette usine sera prête à utiliser les 9.000 chevaux de force captés, ce qui constituera un véritable record dans la réalisation en montagne d’établissements de ce genre.
En ce qui concerne le matériel, nous pouvons indiquer que les alternateurs sont fournis par Le Creusot : les turbines, par la maison Brenier et Xeyret, de Grenoble ; la conduite en tôle d’acier, par la maison Bouchayer et Viallet, de Grenoble.
Cette usine hydro-électrique s’installe dans un des plus pittoresques sites de l’Oisans, sur le territoire de la commune d’Allemont, au hameau du Verney.
Le touriste qui, de Grenoble, se rend à Allemont, doit quitter le tramway au sortir des gorges de la Romanche, à la station de Rochetaillée (7 kilomètres avant Bourg-d’Oisans) et, de là, prendre la gauche et entrer dans l’étroite vallée de l’Eau d’Olle.
L’usine nouvelle est à l’altitude de 770 mètres, à 350 mètres, directement au-dessous du point de chute de la canalisation, dans un site merveilleux, au pied du pic de l’Étendard, altitude 3.700 mètres environ, massif des Grandes-Rousses.
Le point de captation de l’Eau-d’Olle se trouve à 7 kilomètres 500 en amont, au mas de Sagnes, territoire de Vaujany, altitude 1.050 mètres, et la canalisation aboutit à Rochegrand, au-dessus de l’usine.
Les Sagnes sont au pied du massif des Sept Laux, sous le col du Glandon, tant fréquenté par les automobilistes et d’où la vue s’étend sur les monts et glaciers de l’Oisans et sur le massif du mont Blanc.
Des Sagnes on peut revenir à Grenoble par Allemont, ou bien, en sens contraire, se diriger sur la Savoie par le col du Glandon, ou bien encore, par un sentier muletier, sur La Ferrière-d’Allevard et Allevard-les-Bains.
C’est dans ce merveilleux coin des Alpes que l’audace des ingénieurs crée une nouvelle et puissante source d’énergie. Le génie industriel ne respecte plus rien, pas même les beautés de la nature.
C. T.