Démographie de Villard-Notre-Dame

ÉTUDE DÉMOGRAPHIQUE DE VILLARD NOTRE DAME AU XIXe SIÈCLE

Archive André Glaudas : texte tapuscrit de L. Vadot 1986

Après les orages révolutionnaires, le XIXe siècle commence dans un tumulte guerrier sans lendemain, puis vient peu à peu l’évolution économique qui amorce l’ère industrielle. Villard-Notre-Dame semble loin de ces événements qui pourtant vont modifier sérieusement sa vie. Comment ce village perdu de l’Oisans va-t-il traduire les transformations lointaines, les registres de l’état civil nous le révèlent à travers les actes de naissance et de décès.

Partant du niveau du siècle précédent les nombres des naissances s’affaissent et malgré un rebondissement vers 1840 – 1850 on tombe en moins d’un siècle (exactement de 1807 — 1882) à la moitié de la valeur initiale. Le nombre des décès suit lui aussi une évolution analogue, la décroissance étant ici beaucoup plus régulière que pour les naissances. Phénomène significatif, on ne trouve plus dans cette période l’excès marqué des naissances sur les décès, et même souvent le rapport s’inverse. L’émigration systématique du XVIIIe siècle ne se retrouve plus au 19e, ou lorsqu’elle se produit elle n’est plus compensée. Il y a cependant des années relativement fécondes comme 1816, 1819, 1845. Mais il y a également des années de fortes mortalités, 1814, 1815, et sur tout 1817 sont marqués par une grande mortalité infantile ; cependant qu’en 1857, 1858, 1859 ce sont surtout les adultes qui disparaissent. La pratique du nourrissage tend aussi à disparaitre, le dernier décès d’enfant en nourrissage (et ils étaient nombreux remonte à 1833). Pour les mariages aussi l’évolution est décroissante et bien des années, surtout à la fin de la période, n’enregistrent aucun mariage. Il faut noter ici cependant un accident curieux, celui de 1813 qui bat les records avec 8 mariages dans l’année. On peut se demander s’il ne s’agit pas d’une parade à la conscription, c’est en effet l’année où Napoléon après le désastre de Russie tente de reconstituer son armée.
Diminution ou disparition de l’exode systématique, suppression de l’apport temporaire du nourrissage, la population vieillissante se retrouve face à elle-même avec une lente hémorragie qui n’est pas compensée.

Ainsi peu à peu Villard-Notre-Dame s’achemine vers son déclin.

L’établissement d’une courbe de mortalité pour la période 1807 – 1882 est fort intéressant. Par rapport au siècle précédent, la forte mortalité infantile n’est certes pas modifiée, la période de 15 à 30 ans révèle moins de décès, puis la courbe monte pour atteindre son maximum vers 65 ans suivis d’une traine qui dépasse 80 ans. En gros la comparaison avec la courbe du siècle précédent révèle une sorte de basculement creusant sur minimum dû en partie à des départs définitifs. Il ne reste plus que les vieux ce qui explique l’âge remarquablement élevé des décès d’adultes.

Ainsi vieillit la population, mais si on excepte le déchet des jeunes nées, l’âge moyen est étonnamment élevé. Ce sont les villes avec leur promiscuité malsaine qui remplissent les cimetières. Ici par contre la vie toujours très rude de la montagne entretient des hommes solides.

L’examen des registres du XIXe permet de faire une curieuse constatation dans le domaine de la graphologie. Tous les actes sont signés du maire et des témoins, les noms reviennent toujours les mêmes : Gardent, Balmet, Brun et quelques autres preuves de la pérennité locale. Or certaines de ces signatures s’ornent de paraphes pour le moins étonnants en plein XIXe siècle. Ces paraphes sont constitués d’entrelacs précis, réguliers, fidèlement reproduits, dans la meilleure tradition des clercs de XVIe et du XIIe. Faut-il voir là un attachement aux coutumes anciennes comme si les villageois cherchaient à s’ancrer dans le passé pour mieux résister aux tempêtes de l’avenir ?

Villard-Notre-Dame se vide de ses habitants. Les grands toits pointus restent seuls groupés autour de leur église pendant les longs mois d’hiver en attendant que l’été ramène une petite animation saisonnière ou simplement touristique.

Inscription manuscrite en bas du document : 
« À la recherche de Saint-Anne ou les curiosités de Villard-Notre-Dame par L. Vadot (mai 1986) »

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