Le seuil de l’Aveynat 5/5

Le barrage situé à Livet dérivant l’eau de la Romanche. Photo © L.A. 2016

LE SEUIL DE L’AVEYNAT 5/5
1927 Syndicat de défense de la Plaine de l’Oisans en lutte contre le rehaussement du seuil de la plaine d’Oisans. (5e et dernière partie)

Archives :
André Glaudas

Une série de 5 articles consacrés à la plaine d’Oisans et la lutte contre son inondabilité récurrente.
Presque un siècle après sa publication, cet article conserve tout son intérêt et une corrélation avec le nouvel aménagement hydroélectrique de Romanche-Gavet, je vous invite de lire également les trois articles suivants de M. Bernard François, Président de l’association Coutumes et Traditions de l’Oisans :
Bulletin Coutumes et Traditions No 75 : Le barrage de l’Infernet, les détails du projet du barrage d’Édouard Lullin
Bulletin Coutumes et Traditions No 76 et 77 : Abaissement des seuils de la plaine d’Oisans 1/2  et Abaissement des seuils de la plaine d’Oisans 2/2,  (historique complet sur la lutte permanente de la plaine du Bourg-d’Oisans à l’abaissement des seuils de la Romanche.)

1re partie : Le seuil de l’Aveynat 1/5 • 2e partie : Le barrage d’Édouard Lullin • 3e partie : Un barrage automatique
4e partie : L’existence des seuils de Vestre et de Baton 

– Considérations et conclusions du Syndicat de Défense de la Plaine de l’Oisans –

Considérant que tous les membres de la Commission sont persuadés que l’exhaussement du barrage accroît gravement le danger d’inondation, qu’ils ont la conviction raisonnée et appuyée sur l’expérience que malgré toutes les précautions l’automatisme du fonctionnement de ce barrage est loin de la certitude que la prudence courante exige en pareil cas. Que la seule mesure de préservation contre l’aggravation du danger d’inondation, dont par sa situation même le pays est menacé, est la mesure radicale du retour de la retenue de l’usine de Livet au niveau réglementaire de l’arrêté du 13 septembre 1894, toutes autres quelqu’avantages qu’elles puissent offrir n’étant que des palliatifs impuissants à prévenir une catastrophe irrémédiable.

Considérant qu’en exprimant cette opinion, la Commission syndicale ne cède à aucun sentiment hostile contre l’usine de Livet, dont elle ne méconnaît point le rôle bienfaisant au point de vue général, qu’elle n ‘obéit qu’au souci, dont son rôle lui fait devoir, de protéger et défendre les intérêts collectifs dont elle a la charge qui s’opposent, en la circonstance, à un intérêt individuel.
Que si on met en parallèle ces deux ordres d’intérêts, il est impossible de ne pas reconnaître que ceux de la plaine de l Oisans, d’une antériorité sept fois séculaire, l’emportent de beaucoup sur ceux de l’usine de Livet, qui, venue demander au torrent un instrument de richesse, a, pour premier devoir de n’en pas faire un instrument de ruine pour ceux qui n’attendent de leurs terres que le nécessaire à la vie.
Qu’il n’est pas hors de propos de mentionner qu’au moyen de l’exhaussement irrégulier de son barrage la Société propriétaire de l’usine de Livet a réalisé une opération des plus lucratives ; que la surélévation du niveau de sa retenue lui a permis de transformer son canal en conduite forcée, de capter ainsi un volume d’eau plus considérable au moyen duquel, sans construire un second barrage, elle a pu alimenter une seconde usine, dite des Vernes, et obtenir ainsi pour son usine de Livet une force supplémentaire de 8.000 a 10.000 CV, suivant les affirmations imprimées de M. le Directeur général des Usines de Livet.
Qu’elle eut pu, comme les autres usiniers du bassin de la Romanche, se procurer ce supplément de force soit en élargissant son canal, soit en doublant, sa conduite, mais que le jour de l’accès de lieux, auquel M. l’Ingénieur en Chef avait convoqué tous les intéressés, M. le Directeur géneral de la Société déclara que ce travail coûterait un million, oubliant peut-être, cette dépense serait plusieurs fois compensée par la valeur des 8 ou 10.OOO CV quelle procurerait a la Société et que ce n’était pas à la plaine de l’Oisans à payer cet enrichissement de sa ruine possible.
La situation de la plaine de l’Oisans n’est pas unique dans le département de l’Isère et, pour ne parler que de la principale « la plaine du Grésivaudan », il n est pas sans intérêt de démontrer qu’elle est l’objet des préoccupations des hommes politiques et des pouvoirs publics de la région.

Dans le courant de l’année 1926, tous les journaux de Grenoble ont publié la notice suivante :
« L’exhaussement constant du lit de l’Isère est devenu l’objet des préoccupations de tous ceux qui s’intéressent à l’avenir économique de la plaine du Grésivaudan. Les pouvoirs publics se sont émus de ce danger permanent et, sur l’initiative de M. le député PAGANON, des fonds ont été voté par l’État et par le Conseil général pour rechercher un remède à cet état inquiétant. M. Simon, ingénieur en chef des Services hydrauliques du Sud-Est, a déclaré que les barrages à établir sur l’Isère pour la création d’usines électriques ne seront autorisés que s’ils n’aggravent pas la situation.

POUR TOUTES CES RAISONS, LA COMMISSION SYNDICALE, À L’UNANIMITÉ :

1o Déclare persister dans toutes ses délibérations a antérieur demandant le retour de la retenue de l’usine de Livet au niveau fixé par l’arrêté du 13 septembre 1894, c’est-à-dire à la cote 700,65 et réitère avec insistance ses protestations et réclamations à ce sujet.
2o Demande à l’Administration Préfectorale et à celle des Ponts et Chaussées d’user de tous les
moyens à leur disposition, pour faire exécuter, sans délai, les basses eaux le permettant, l’arrêté préfectoral du 17 juin 1925, prescrivant ce retour à la cote 700,65 et qui est resté lettre morte ;
3o Demande avec la même insistance que l’abaissement des seuils de Vestre, de Baton et de l’Aveynat soit mis au plus tôt à l’étude et que l’exécution de ce travail soit poursuivie avec toute la célérité possible.
4o Déclare tenir la Société propriétaire du barrage pour responlsable des conséquences de toute inondation qui pourrait survenir tant que le barrage n’aura pas été ramené à son niveau réglementaire;
5o Décide qu’un exemplaire de la présente délibération sera adressé à Monsieur le Préfet, Monsieur le Président du Conseil général, Monsieur l’Ingénieur en Chef, Monsieur le Ministre des Travaux publics Monsieur le Ministre de l’Agriculture.
Ainsi délibéré et ont signé au registre : BETTOU, PELLISSIER, VIEUX Maximin, GLAUDAT, DAUPHIN, MOUNIER-POUTOT, LUTEL et REY, syndics.

– Réunion intersyndicale du 15 janvier 1927 –

Les Commissions syndicales des Syndicats, Supérieur, Inférieur , d’Allemont, de Sarennes, de la Paute, des Alberges, et du Clapier, réunies salle de la Mairie, le 15 janvier 1927, après avoir entendu la lecture de la délibération ci-dessus, relative au Barrage établi par la Société Keler et Leleux au Pont de l’Aveynat, prise par le Syndicat Supérieur de l’Oisans dans sa séance du 9 janvier dernier, font leurs les termes de ladite délibération et l’approuve à l’unanimité.
Elles décident que cette délibération sera imprimée et distribuée aux 1.500 assujettis aux taxes des divers Syndicats; que de la dépense résultant de cette impression sera payée par tous les Syndicats au prorata de leur importance.
Elles désignent M. Bettou Joseph Directeur du Syndicat Supérieur de l’Oisans, pour les représenter auprès des pouvoirs publics, poursuivre et faire toutes démarches nécessaires jusqu’à ce que satisfaction soit donnée à leurs justes revendications.

Ainsi délibéré et ont signé l’original de la délibération ci-dessus :

Pour le Syndicat Supérieur :
BETTOU Joseph ; PELLISSIER Ph ; VIEUX Maximin ; GLAUDAT J.-M ; DAUPHIN M. ; MOUNIER-POUTOT ; LUTEL Louis ; REY Paul.

Pour le Syndicat Inférieur :
BOUTHÉON Fernand ; SONNIER Eugène ; ROBERT Philippe ; POUTOT Romain.

Pour le Syndicat de Sarennes :
GENEVOIS François ; CROS Alphonse ; SONNIER Jules ; MANIN Louis ; ENNIEUX Hugues ; RAVEL Séraphin.

Pour le Syndicat de la Paute :
POUTOT Romain ; DOULA Constantin ; GUILLOT Séraphin ; BERLIOUX Auguste ; DUSSERT Pierre.
SORREL J.-P.

Syndicat du Clapier :
CAIX Elie ; ALBERT Jh ; BOS Félix ; OUGIER Jules ; JOSSERAND Émile.

Pour le Syndicat d’Allemont :
GIROUTRU Alexandre ; REVOL ; MICHEL ; FAVIER Auguste ; LAFFAY Etienne ; OLLIVIER Louis.

Pour le Syndicat des Alberges :
BOS Félix ; PIPET Alphonse ; BARD Maximin ; JOSSERAND Joseph ; SOUCHON Aristide.

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