L’Oisans, l’éden du tourisme en 1898

Clliquez-moi !

Les Écrins depuis la vallée du Vénéon. Source : Culture.gouv.fr

L’OISANS, L’ÉDEN DU TOURISME EN 1898

Source : Les Alpes illustrées, édition du 1er août 1898

Sur le même sujet : 
– Ode à l’eau d’Olle
– 1914 le parc des Écrins
– Plaidoyer pour la Petite Route de l’Oisans

[Nous avons publié, l’année dernière, un intéressant article descriptif sur cet admirable pays de l’Oisans. Nous recevons aujourd’hui le vigoureux appel que l’on va lire.
Les touristes, en quête d’une villégiature charmante et pittoresque n’hésiteront point à accorder leur confiance aux dires de nos collaborateurs, et à partir le plus vite possible pour ce centre d’excursions variées et superbes. — B.]

Il faut que des esprits malveillants se soient plu à médire de l’Oisans pour que l’on soit ainsi tenté de le condamner, sans même se rendre compte si l’acte d’accusation est basé sur des raisons sérieuses. Je me souviens, moi-même, d’avoir rencontré en Bourgogne, en Normandie, en Gascogne et ailleurs, des gens qui me prenaient en aversion parce que j’avais le malheur d’être un enfant de ce pays, un vrai brûleur de loups.

Ah ! que nos « porte-balles » savent bien quel est l’esprit qui anime l’étranger quand ils s’en vont l’hiver, bien loin de leur foyer, gagner péniblement leur vie. Pas un seul n’avoue qu’il est de l’Oisans. Dauphinois ! Brûleur de loups ! encore… mais Oisannais (!), oh ! non.

L’Oisans est-il donc aussi déshérité qu’on veut bien le dire ? Non.

L’Oisans est au contraire une très belle région offrant à ses visiteurs tout ce que ceux-ci sont en droit d’exiger d’un pays de montagne : cascades magnifiques, prairies riantes, gorges sauvages, massifs grandioses, glaciers superbes ; une faune et une flore très riches ; la paix, l’air, le silence ; tout ce que le vrai touriste peut désirer. Il ne manque à l’Oisans que d’être connu.

Semblable à la pierre précieuse dormant dans la gangue qui ternit ses feux, l’Oisans repose modestement sous ses voiles en attendant que le touriste gravisse ses étages, que le géologue analyse ses trésors, que le botaniste ouvre l’écrin de sa flore, et que le peintre, l’écrivain, l’amateur de la belle nature le fassent connaître urbi et orbi, en lui prêtant les moyens dont ils disposent, en lui concédant une des trompettes de la Renommée.

Vous tous, savants, à l’affût de l’inconnu ; artistes, amateurs d’horizons poétiques, vous tous, promeneurs altérés de merveilles, qui recherchez pour votre bonheur les sites élevés, grandioses, sauvages. Que l’art spéculatif n’a point soustrait aux beautés du naturel ; vous tous, humains, qui souffrez dans l’air tiède et confiné des villes, qui avez besoin, pour refaire vos forces, de cette atmosphère pure, de cet air trais, de ce silence reposant, de ces effluves embaumés, que ne venez-vous dans l’Oisans ?

Pourquoi fuyez-vous la France, pourquoi portez-vous votre or et votre cœur dans ces parages lointains, en Suisse, en Autriche, en Allemagne, en Norvège, alors que les Alpes dauphinoises éclipsent tout ce que vous pouvez voir de plus beau à l’étranger !

Venez admirer un coucher de soleil sur les Grandes Rousses. L’art ne saurait rendre rien de pareil. Venez admirer les nombreuses et hautes cascades qui déroulent leurs rubans brumeux sur le flanc des rochers abrupts. Venez voir ces gorges sauvages, ces forêts magnifiques, ces torrents fougueux, ces neiges éternelles. Grimpez sur une des nombreuses crêtes qui émergent des massifs du Pelvoux, des Monts-de-Lans, du Taillefer, etc. Vous arriverez là sans danger, et de ce domaine élevé des aigles et des chamois, vous dominerez au loin les plaines, les monts, l’espace.

Comme on est dédommagé de ses fatigues quand, au moment le plus incertain, on y trouve à ses pieds une fleurette rare, un minéral précieux, un insecte inconnu et, avec cela, un incomparable tableau de gorges, de vallons, de pics.

Et comme il est bon le repos, le soir, dans ces bonnes auberges de campagne, à 15 ou 1 800 mètres d’altitude, au milieu de cette sympathie rustique, mais franche, transmise par les aïeux.

Les chemins existent dans la plupart des beaux sites ; quelques routes et sentiers sont encore à créer, il est vrai, mais le grand charme des ascensions n’est-il pas dans les efforts qu’elles demandent ?

J’avoue qu’il nous manque encore quelques bons hôtels dans la montagne. On trouve néanmoins toujours bon gite en Oisans.

Qu’on descende à Livet, à Allemont, au Bourg-d’Oisans, au Périer, au Freney, à Venosc, à Saint-Christophe, à La Grave, au Lautaret, ne trouve-t-on pas là des hôtels très confortables ? Et ce sont autant de centres d’excursions ; de chacun de ces points, l’on peut rayonner partout et visiter la montagne, parcourir des sites riants et revenir le soir à l’hôtel.

Pour moi, l’Oisans est un beau pays à visiter. Qu’on se le dise.

C’est un Éden, l’éden du tourisme. Il peut bien y manquer quelque chose encore, mais Paris, dit-on, ne s’est pas fait en un jour.

C. Ch. dit Silex-Hyalin.

 

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